Mes Coups de Coeur Culturels et bien d'autres...

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"ARDENTE PATIENCE" d'Antonio Skàrmeta *

 

 

Comment ne pas évoquer toute  la phrase de  Rimbaud pour comprendre la finalité

de cette pièce ?

«  Ce n’est qu’au prix d’une ardente patience que nous pourrons conquérir la cité splendide qui donnera la lumière, la justice et la dignité à tous les hommes.  Ainsi la poésie n’aura pas chanté en vain ».

Oui, la poésie a toute sa place dans ce spectacle de qualité interprété par le brillant comédien Jean-Paul Zennacker allias Pablo Neruda qui nous fait aimer la poésie, s’il en était besoin, par sa belle voix et sa  magnifique  prestance. De même, Frédéric Kontogom,  le facteur  nous emporte dans son enthousiasme débordant d’amour pour sa Béatrice « celle qui apporte le bonheur »  et dont le poète Dante, évoqué dans la pièce, dédia toute son oeuvre.

Retiré du monde, Pablo Néruda a choisi de vivre dans  cette petite île, Isla Negra au Sud de Valparaiso où Mario Jiménez, un jeune facteur quelque peu naïf et ignorant bénéficie du privilège d’apporter chaque matin son courrier au prestigieux destinataire. Brusquement amoureux de Béatrice et quelque peu rejeté par la mère, le facteur demande conseil au poète.

Sur un fond politique, le Chili traversant l’une des crises les plus profondes de son histoire, les 2 hommes se lient d’amitié. C’est la période où, Pablo Néruda est proposé pour le Prix Nobel de Littérature (qu’il obtiendra en 1971) et, Salvador Allende, élu en 1970 Président de la République du Chili, espère transformer son pays pacifiquement pour le bien de son peuple. Hélas, le coup d’état de Pinochet, le 11 septembre 1973 engendre de véritables massacres et Allende est retrouvé mort.

Adaptée du roman du chilien Antonio Skàrmeta, cette pièce est empreinte de sentiments mêlés : émotion, nostalgie, drôleries,…, dans un décor réaliste propre à susciter des relations humaines privilégiées.  En somme, une histoire d’amour et d’amitié, sur fond de tragédie, propre à nous émouvoir.

La mise en scène savamment étudiée par Michel Batz fait évoluer les personnages, tour à tour de « l’antre » du poète au bar de la maman de la dulcinée, en passant par le circuit à vélo du facteur. Sans oublier, sur grand écran, le bruit lancinant du flux et du reflux de la mer sur les rochers donnant encore plus d’intensité au chant de la poésie…

 

Les chansons composées notamment par Victor Jara, compositeur chilien assassiné quelques jours après le coup d’état et les musiques originales de Wladimir Beltran et de Léo Mélo, parfois joyeuses, parfois mélancoliques plongent le spectateur dans un entre-deux : la beauté de la poésie et de l’amour au rythme des musiques sud-américaines et la fragilité des êtres à l’évocation de circonstances tragiques, à l’évocation de l’exil et devant l’inéluctable, la mort du poète aimé, du Maître  tant admiré.

Un spectacle de qualité où tous les comédiens concourent à sa réussite : Laura Cazès-Pailler (alias Béatrice Gonzàlez ), Nadine Servan (Rosa veuve Gonzàlez ),  Wladimir Beltran et Léo Mélo (comédiens et musiciens).

 photo de pablo néruda et le facteur.jpg

 

Les amoureux de la poésie y trouveront leur compte, cependant que les passionnés de politique déploreront  la petite part consacrée à cette période  chilienne qui a bouleversé le monde, à la Grande Histoire du Chili, celle des massacres, celle des évènements tragiques, celle de la philosophie des idéaux révolutionnaires bafoués.

Quoiqu’il en soit, ce beau moment de théâtre est à voir.

 

*  Théâtre de l’Epée de Bois (La Cartoucherie ), 75012 Paris,

    tél : 01 48 08 39 74. Jusqu’au 20 octobre 2013.

 

                                                                                                Lydie-Léa Chaize, journaliste



09/10/2013
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