" La Promesse de l'Aube " de Romain Gary **
Mise en scène et interprétée par Stéphane Freiss (avec la complicité de Rachel Khan et Amélie Wendling)
Une œuvre magistrale ! Un moment suspendu par une relation fusionnelle entre
mère et fils.
C’est une mère absolue qui, à force d’être aussi proche de son fils, en devient
prophétique. A moins qu’elle n’ait fait de lui l’instrument de sa propre ambition, au
mépris de la liberté psychologique de son enfant unique. Avec un accent à couper
au couteau que Stéphane Freiss imite parfaitement, elle imprime à jamais dans l’esprit
de son fils : " Tu seras un héRos, tu seras généRal, GabRiele D’Annunzio,
ambassadeuR de France… ".
A cela que peut répondre un fils reconnaissant ? " On regarde, on espère, on attend.
Avec l’amour maternel, la vie vous fait à l’aube une promesse qu’elle ne tient jamais….
Ce que je veux dire, c’est qu’elle (Nina, sa mère) avait des yeux où il faisait si bon vivre
que je n’ai jamais su où aller depuis ".
Ce chef d’œuvre de la littérature paru en 1960, est peut être un vibrant hommage à
une mère excessive mais ô combien aimante, ayant élevé seule son enfant, trop
souvent dans le dénuement. Cependant, n’est-ce pas là aussi le cri d’un homme qui,
malgré la renommée dont il fut auréolé, n’a peut-être pas été ce qu’il aurait rêvé
d’être ? Romain Gary deviendra ce qu’il a été, au-delà des espérances de sa génitrice ! Consul Général
de France à Los Angelès, Commandeur de la Légion d’honneur, titulaire de la Croix de guerre, … et, notamment un brillant écrivain. Deux prix Goncourt (inédit) " Les Racines du Ciel " dont « La Vie devant soi », sous le pseudonyme d’Emile Ajar.
Les extraits choisis par le comédien sont souvent plein d’humour. On en aurait aimés davantage de plus émouvants, comme par exemple, celui-ci :
"On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné. Jamais plus, jamais plus, jamais plus. Des bras adorables se referment autour de votre cou et des lèvres très douces vous parlent d'amour, mais vous êtes au courant. Vous êtes passé à la source très tôt et vous avez tout bu. Lorsque la soif vous reprend, vous avez beau vous jeter de tous côtés, il n'y a plus de puits, il n'y a que des mirages. Vous avez fait, dès la première lueur de l'aube, une étude très serrée de l'amour et vous avez sur vous de la documentation. Je ne dis pas qu'il faille empêcher les mères d'aimer leurs petits. Je dis simplement qu'il vaut mieux que les mères aient encore quelqu'un d'autre à aimer. Si ma mère avait eu un amant, je n'aurais pas passé ma vie à mourir de soif auprès de chaque fontaine ». Ceci expliquant probablement son suicide. Quoiqu’il en soit, Romain Gary nous offre dans « La Promesse de l’Aube» un texte juste d’une beauté fracassante !
Et, pour les nostalgiques, voici un lieu emblématique à Paris où a vécu Romain Gary après avoir vécu son adolescence avec sa mère à Nice.
Plaque en mémoire de Romain Gary
apposée sur son domicile parisien au no 108 de la rue du Bac
Stéphane Freiss assure avec talent une mise en scène sympathiquement surprenante.
Assis sur un fauteuil rouge, en vis-à-vis d’un autre désormais vide, d’une voix douce et tendre, c’est avec élégance et discrétion que le comédien tourne les pages, une à
une, d’un roman éternel qui l’inspire, à n’en pas douter.
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** Théâtre de Poche-Montparnasse, 75 boulevard du Montparnasse 75006 Paris.
Réservations : 01 45 44 50 21 / www.theatredepoche-montparnasse.com
Lydie Léa Chaize
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