"JE MARCHE DANS LA NUIT " de Ahmed MADANI
Dans la plaquette de présentation, mon ami psy Jean-Pierre Winter est cité pour son ouvrage « transmettre (ou pas ) » et c’est bien là le noeud de la question… mais aussi, accepter ou pas.
Le titre est le premier vers d’un quatrain de Lamartine et ce n’est qu’après avoir vu la pièce que l’on peut en comprendre le choix, cependant il interroge d’entrée et ce n’est pas si mal. D’autant que le texte de présentation parle beaucoup de guerre d’Algérie dont on n’est pas forcément enclin d’aller voir. Pourtant, ce serait une erreur car cette allusion n’apparait qu’à la fin en couperet de conclusion alors que toute la pièce est d’un intimisme prenant entre un grand-père bourru, par définition ancienne génération et un petit-fils déjanté et rebelle.
Une rencontre simplissime, triste et joyeuse simultanément, dans un décor quasi inexistant réduit à six planches... D’abord une rencontre agressive - pensez donc ! une génération sautée par l’absence du père - puis progressivement compréhensive, puis enthousiaste, puis finalement attachante et sublime de partage. Nostalgie lourde à porter pour le grand-père, incompréhension qui s’atténue pour le petit-fils. Un dialogue ciselé totalement en phase avec les âges et les vécus des deux personnages, remarquables de différence et de justesse de jeu. Pas facile de jouer un tel texte durant 70 minutes allant de l’insulte à l’amour, du refus à l’acceptation.
Un homme profondément blessé par son passé de jeune appelé en Algérie (révélé bien heureusement qu’à la fin car, les séances de torture même décrites avec pudeur sont là) accepte par défaut du père de voir sa vie de campagnard bouleversée par l’arrivée de ce petit-fils paumé et qui ne pense qu’à son téléphone portable et aux nuggets, totalement hermétique à ce que peut être une autre façon de vivre que la sienne, qui en fait ne le rend pas heureux.
Psychologie et sociologie se mélangent dans un dialogue simple mais percutant et tellement vrai. Un homme âgé ancré dans ses habitudes, solitaire, et un adolescent de banlieue se cherchent par antagonisme exacerbé et finissent par se trouver de façon sensible et humaine en alternant provocation et sentiments inavoués façonnés de pudeur forte.
Avec les comédiens Vincent Dedienne et Yves Graffey.
Texte écrit et mis en scène par Ahmed Madani.
A titre purement personnel et presque égoïste, il me plait de rappeler que « La Cartoucherie » est un lieu mythique : Molière, Ariane et les chevaux voisins… avec une salle minuscule et donc chaleureuse, et un avant ou un after sympa, à petit prix pour un en-cas ou un pot…
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* Théâtre de La Tempête à La Cartoucherie, route du champs de manœuvre
75012 Paris.
Réservations : 01 43 28 36 36 / www.la-tempete.fr
Jusqu’au 13 Avril 2014 du mardi au samedi 20 h 30, dimanche 16 h 30.
Jacques André
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